Conseil d’Etat, 21 octobre 2022, n°456254
C’est au fonctionnaire sanctionné de demander à lire les témoignages recensés dans son dossier.
Par un arrêt du 21 octobre 2022, le Conseil d’Etat a jugé qu’un fonctionnaire ne peut pas reprocher de ne pas avoir eu accès aux procès-verbaux des témoignages recueillis dans le cadre d’une enquête le visant et donnant lieu à une décision le concernant dès lors qu’il a eu accès à son dossier listant ces témoignages et qu’il ne les a pas demandés.
En l’espèce, M. B., sous-préfet de Lorient. Le 2 juillet 2021, a fait l’objet d’une enquête administrative au terme de laquelle, le Président de la République a mis fin à ses fonctions. M. B. a alors demandé au Conseil d’Etat d’annuler ce décret.
La haute assemblée rappelle qu’
« en vertu de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, un agent public faisant l'objet d'une mesure prise en considération de sa personne, qu'elle soit ou non justifiée par l'intérêt du service, doit être mis à même d'obtenir communication de son dossier ».
Elle rappelle aussi que
« lorsqu'une enquête administrative a été diligentée sur le comportement d'un agent public ou porte sur des faits qui, s'ils sont établis, sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire ou de justifier que soit prise une mesure en considération de la personne d'un tel agent, l'intéressé doit, en application de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, être mis à même d'obtenir communication du rapport établi à l'issue de cette enquête, ainsi que, lorsqu'ils existent, des procès-verbaux des auditions des personnes entendues sur le comportement de l'agent faisant l'objet de l'enquête, sauf si la communication de ces procès-verbaux serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui ont témoigné ».
Or,
« il ressort des pièces du dossier que la décision de mettre fin aux fonctions de M. B. a été prise, notamment, au vu d'un rapport du conseil supérieur de l'appui territorial et de l'évaluation d'avril 2021, qui avait été diligenté seulement seize mois après la précédente évaluation dont l'intéressé avait fait l'objet, après des alertes sur des problèmes de risques psycho-sociaux à la sous-préfecture de Lorient, et qui a fait état d'un comportement et d'un management inadaptés de celui-ci et a recommandé qu'il quitte son poste à brève échéance au regard de la détérioration du climat au sein de la sous-préfecture et des interrogations des partenaires extérieurs sur ses méthodes. La décision de mettre fin aux fonctions de M. B. ayant été prise, à la suite de ce rapport, en considération de son comportement, elle devait être précédée de la formalité instituée par l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 ».
Le Conseil d’Etat estime alors que
« M. B. a été informé, lors d'un entretien avec le préfet, directeur de la modernisation et de l'administration territoriale, qu'il allait être proposé au Président de la République de mettre fin à ses fonctions de sous-préfet de Lorient et qu'il avait la possibilité de consulter son dossier et de formuler des observations, ce qu'il a fait. Si le dossier consulté ne comprenait pas les cinquante-huit procès-verbaux des auditions d'agents et personnalités réalisées dans le cadre de la mission d'évaluation menée par le conseil supérieur de l'appui territorial et de l'évaluation, il ressort des pièces du dossier que M. B., qui avait connaissance de cette liste qui figurait en annexe du rapport qui lui avait été communiqué et qui était au dossier consulté, n'a pas demandé la communication de ces pièces. Dans ces conditions, M. B. n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas été mis à même d'obtenir communication de l'intégralité de son dossier en méconnaissance de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 et que la mesure mettant fin à ses fonctions a été prise au terme d'une procédure irrégulière ».
Source : Fil DP